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Dernière Mise à Jour:
Le 14-05-2023 19:15

Coxarthrose

Introduction

La coxarthrose ou arthrose de la hanche est une des causes les plus fréquentes de douleur et d’incapacité fonctionnelle chez les sujets de 55 ans et plus. On distingue deux types de coxarthrose :

 - La coxarthrose primitive est le nom pudiquement donné à l’arthrose de la hanche sans cause décelable. Elle apparaît après 50 ans et résulte d’un terrain génétique certain mais non identifié.

 - La coxarthrose secondaire survient plus précocement vers 45 ans. Elle est associée à des anomalies morphologiques de la hanche. Elle représente 60% de l’ensemble des coxarthroses. Elle est plus grave et plus rapidement évolutive que la coxarthrose primitive.

En dehors de quelques cas particuliers le diagnostic est facile il repose sur les données de l’interrogatoire de l’examen clinique et sur la lecture de la radiographie du bassin et le faux profil de Lequesne. La prise en charge thérapeutique est multidisciplinaire les indications thérapeutiques tiennent compte de l’age de la cause de la coxarthrose et de son retentissement fonctionnel. La chirurgie prothétique a pu transformer le pronostic de cette affection.

Epidémiologie

La prévalence de la coxarthrose augmente avec l’age avec une légère prédominance féminine après 50 ans. L’incidence standardisée par âge et par sexe est estimée entre 473 et 88/100 000 sujets-années [12] et augmente avec l’âge pour atteindre 445/100 000 chez les femmes âgées de 70 à 79 ans. La coxarthrose a un retentissement socio-économique remarquable d’autant plus que sa fréquence est en nette augmentation du fait du vieillissement de la population et de la progression de certains facteurs de risque tel l’obésité.

Physiopathologie

La coxarthrose se développe plus fréquemment en cas d’obésité ou en cas de microtraumatismes répétés (coxarthrose du sportif) aboutissant à une hyperpression articulaire. De même un vice architectural peut aboutir à des pressions réparties anormalement sur le cartilage et aboutir à une arthrose précoce (dysplasie de hanche). I1 est donc logique d’incriminer en premier lieu cet élément mécanique qui et lui seul devrait suffire à entraîner une arthrose.

La coxarthrose résulte de plusieurs lésions anatomiques qui affectent tous les tissus articulaires. Il s’agit de fissures qui s’étendent de la surface vers la profondeur du cartilage le détachent en lambeaux et conduisent à la dénudation de l’os sous-chondral. Le cartilage fissuré est ramolli hyperhydraté appauvri en protéoglycanes avec des chondrocytes évoluant vers la nécrose. L’os sous-chodral est le siège d’un hyper remodelage condensant et géodique. La synoviale normale au début devient ensuite inflammatoire hyperplasique  hypervasculaire avec prolifération des synoviocytes [3]. Le chondrocyte joue un rôle remarquable dans ce processus: il augmente sa synthèse de protéoglycanes et du collagène mais aussi celle des enzymes de dégradation qui finissent par l’emporter. Il existe un freinateur qui peut contrebalancer ces actions lytiques : c’est le TIMP (tissue inhibitor of metalloproteases) dont l’interleukine 6 stimule la synthèse [4].

Diagnostic positif

L’interrogatoire et l’examen clinique permettent de rattacher la douleur à une pathologie de la hanche [5]. L’interrogatoire précisera les antécédents de maladie luxante de la hanche dans l’enfance de traumatisme rhumatisme inflammatoire chronique coxarthrose familiale pratique sportive et les facteurs de comorbidité: obésité athérosclérose ou diabète.

Les principaux signes fonctionnels sont :

*La douleur : c’est le maître symptôme elle est de type mécanique parfois mixte ou inflammatoire. Elle siège le plus souvent au pli de l’aine parfois à la face antérieure de la cuisse en regard du grand trochanter ou au niveau de la fesse. Elle peut siéger exclusivement au niveau du genou d’où la nécessité d’examiner prioritairement la hanche devant toute douleur du genou. La douleur peut irradier vers la face antérieure de la cuisse parfois la face postérieure de la cuisse. Elle apparaît au lever de la chaise à la marche sur  terrain plat et à la  montée des escaliers.

*La gêne fonctionnelle : La douleur et la raideur de la hanche entraînent une diminution des déplacements et réduisent le périmètre de marche. La limitation de la flexion est à l’origine d’une gêne à l’accroupissement à la station assise en siège bas une difficulté à se chausser (signe du soulier) et à se couper les ongles. Le degré de la gêne et la douleur sont appréciées par l’indice algo-fonctionnel de Lequesne (Tableau I). 

Tableau I : Indice de Lequesne

Lors du « dérouillage » matinal pendant quelques minutes ou durant plus d’un quart d’heure

Douleur

Douleur nocturne selon mouvements ou posture ou même immobile

1
2

Lors du « dérouillage » matinal pendant quelques minutes ou durant plus d’un quart d’heure

1
2

Lors de la station debout pendant ou du piétinement pendant 1/2 heure

1

Lors de la marche au-dehors seulement après quelque distance ou dès les premiers pas et allant croissant

1
2

Gêne lors de la station assise prolongée

1

Marche maximale

Plus de 1 km mais limitée

1

Environ 1 km (environ 15 minutes)

2

500 à 900 mètres (environ 8 à 15 minutes)

3

300 à 500 mètres

4

100 à 300 mètres

5

Moins de 100 mètres

6

** avec une canne ou canne-béquille

+1

*** avec 2 cannes ou cannes-béquilles

+2

Difficultés pour

Enfiler chaussette ou collant par devant

0 à 2

Ramasser un objet à terre

0 à 2

Monter et descendre un étage

0 à 2

Sortir d’une voiture

0 à 2

Retentissement sur l’activité sexuelle

0 à 2

 On apprécie à  l’examen physique la marche qui peut se faire avec esquive du pas du côté atteint. La boiterie est fréquente en cas de flexum. On recherche également une amyotrophie quadricipitale et fessière une attitude vicieuse en flexum ou un aspect de raccourcissement du membre inférieur. L’appui monopodal peut être douloureux et/ou impossible à réaliser ou à maintenir. 

L’exploration de la mobilité active se fait par la recherche du syndrome clinostatique (impossibilité de décoller le membre inférieur tendu du plan du lit). La manœuvre du salut coxal a pour but la reproduction de la douleur: le patient est prié de maintenir le membre inférieur tendu à 30° au-dessus du plan du lit pendant 10 à 15 secondes. Le signe de la clé: membre inférieur détendu mains de l’examinateur sur la cuisse et la jambe du patient exécutant des mouvements de rotation interne et externe du membre inférieur [6].

L’exploration de la mobilité passive: il existe une limitation des amplitudes articulaires ainsi la rotation interne et l’abduction sont les premières à être limitées la flexion est longtemps conservée. La cotation articulaire est importante pour le suivi évolutif.

L’examen général doit apprécier la hanche controlatérale les articulations sous-jacentes (genoux chevilles) le rachis et les mains (nodules de Bouchard et d’ Heberden).

L’imagerie [7] repose sur la radiographie standard essentiellement la radiographie du bassin de face en charge et le faux- profil de Lequesne qui permet de visualiser l’interligne antéro-supérieur et postérieur. Les principaux signes sont : le pincement de l’interligne articulaire l’ostéophytose  marginale L’ostéosclérose condensante de l’os sous-chondral et les géodes (30 à 40% des cas) [figure 1].  Il est par ailleurs important de rappeler l’existence d’une dissociation radio-clinique.

Figure 1: pincement électif de l’interligne coxofémoral condensation sous-chondrale et ostéophytose.

 

Le bilan radiologique permet de rechercher une anomalie préexistante par la coxométrie. Sur une incidence de bassin de face on définit plusieurs points de repère [figure 2a]:

* C = centre de la tête fémorale

* T = point interne du toit du cotyle

* E = point externe du toit du cotyle.

De même on définit deux lignes:

* une ligne horizontale passant par deux points symétriques du bassin (T T') = ligne H

* une ligne verticale perpendiculaire à la précédente et passant par le point C = ligne V.

Normalement l'angle de couverture externe du toit du cotyle VCE est supérieur ou égal à 25° l'angle d'obliquité du toit du cotyle HTE est inférieur ou égal à 10° et l'angle cervico-diaphysaire  (CC’D) est entre 135 et140°.

Sur un faux profil de Lequesne on définit trois points de repère [figure 2b]:

* C = centre de la tête fémorale

* V = verticale passant par le point C

* A = limite antérieure du condensé du toit du cotyle.

Normalement l'angle de couverture antérieure du toit du cotyle VCA est supérieur ou égal à 25° [8].

Figure 2: a) Coxométrie: bassin de face. b): coxométrie: faux profil de Lequesne

 

 

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est utile pour le diagnostic différentiel de l’ostéonecrose aseptique de la tête fémorale l’algodystrophie et les ostéoses cancéreuses métastatiques [9]. L’échographie articulaire est demandée à la recherche d’une éventuelle bursite du psoas ou une hydarthrose. Le bilan biologique montre l’absence de syndrome inflammatoire ou d’anomalie métabolique

Diagnostic différentiel

Les principaux diagnostiques différentiels sont :

- Les radiculalgies et les douleurs tronculaires. La mobilité articulaire et la radiographie du bassin sont dans ces cas normales.

- Artériopathie des membres inférieurs

- Adénopathie  inguinale

- Tendinite du moyen fessier: douleur  externe en abduction contrariée.

- Tendinite du pyramidal : Douleur postérieure en rotation externe contrariée

- Tendinite du psoas : Douleur à la flexion contrariée.

 - Algodystrophie

 - Fracture de fatigue du col fémoral.

 - Coxites rhumatismales: spondylarthrite ankylosante essentiellement

- Coxite infectieuse à germe banal ou tuberculeuse

- Pathologie synoviale: synovite villonodulaire ostéochondromatose

 - Atteinte des structures osseuses: métastase ostéome ostéoïde

Formes cliniques

1 – Formes étiologiques

Coxarthroses secondaires à une anomalie d’architecture

L’objectif majeur notamment chez un sujet jeune est de ne pas passer à côté d’un vice architectural de la hanche.

Dysplasie supéro-externe (figure 7.6)

Les coxarthroses sont souvent secondaires à une dysplasie supéro-externe (maladie luxante de la hanche). Le plus souvent la maladie luxante se résume à une simple dysplasie.

Cette dysplasie résulte :

-          d’une anomalie de l’extrémité supérieure du fémur avec un col trop vertical (coxa valga) mise en évidence par le calcul de l’angle cervico-diaphysaire supérieur à 120° mais aussi anormalement antéversé (coxa antetorsa). à un stade de plus la perte du cintre cervico-obturateur définit la maladie sub- luxante ;

-          d’une dysplasie du toit du cotyle +++. La coxométrie montre une insuffisance de couverture du toit du cotyle qui ne contient plus la tête en dehors et en avant avec des angles VCE et VCA inférieurs à 20° souvent associée à une obliquité excessive du toit avec un angle HTE à 12°.

Les deux anomalies sont souvent associées. La tête apparaît alors volontiers aplatie dans la localisation supéro-externe avec souvent des trabéculations osseuses dites en « rideau de pluie ».

La dysplasie de hanche rend compte de 40 % des coxarthroses. C’est une maladie qui est souvent bilatérale et asymétrique.

Dysplasie interne ou protrusions acétabulaires

Responsable de 5 % des causes de coxarthrose plus souvent chez la femme et volontiers bilatéral. Le début est souvent plus tardif et l’évolution plus lente que pour une coxarthrose supéro-externe. Le diagnostic peut être évident si la protrusion est importante (coxa profunda) parfois il faut rechercher des signes plus mineurs à type de col trop horizontal (coxa vara) et d’un cotyle trop profond. Cette malformation est mise en évidence par les calculs de la coxométrie l’angle VCE est supérieur à 35° l’angle HTE est de 0 à 5° et surtout par la position de ligne acétabulaire (arrière-fond) qui déborde en dedans la ligne ilio-ischiatique. Le pincement est maximum en interne et surtout postérieur sur le faux profil de Lequesne.

Coxa plana

Elle correspond à des séquelles d’ostéochondrite de l’enfance ou maladie de Leggs Perthes et Calvé. C’est une maladie fréquente chez le garçon entre 5 et 10 ans. Elle est parfois bilatérale. Elle correspond à une fragmentation du noyau céphalique avec à l’âge adulte une déformation dite en « béret basque » de la tête fémorale.

Coxa retorsa

Il s’agit d’une séquelle d’une épiphysiolyse de l’adolescent volontiers bilatérale qui survient entre 10 et 16 ans souvent chez les garçons obèses. Le glissement de la tête fémorale en bas et en arrière peut être évident ou seulement minime et la présence d’une ostéophytose du col fémoral supérieur doit attirer l’attention.

b. Coxarthroses secondaires à une autre pathologie de hanche

Fractures du cotyle ou du toit cotyloïdien.

Nécroses de la tête fémorale.

Coxites évoluées de la spondylarthrite ou la polyarthrite.

Inégalité des membres inférieurs lorsqu’elle dépasse 2 cm.

2 - Formes évolutives : 

La  coxarthrose destructrice rapide (CDR) [10] est définie par un pincement de plus de 50 % de l’interligne ou de 2 mm en l’espace d’un an. Elle est caractérisée par une douleur de début brutal très intense à recrudescence nocturne. Elle se rencontre préférentiellement chez la femme de 65 ans volontiers obèse parfois déclenchée par un traumatisme articulaire ou un surmenage physique. La CDR évolue très rapidement vers un pincement global de l’interligne sans ostéophytose. Seule la répétition des clichés (minimum à 3 mois d’intervalle) met en évidence la chondrolyse. L’évolution peut se faire vers l’ostéolyse de la tête fémorale. Le doute avec une coxite impose la ponction articulaire pour analyser le liquide synovial. Il existe des formes d’évolution très rapide soit plus de 2 mm en un an soit semi rapide seulement 1 mm en un an qui surviennent sur des coxarthroses installées. Ces formes ont une présentation cliniquement identique à des CDR de novo et le diagnostic se fait sur l’évolutivité rapide du pincement de l’interligne articulaire.

Evolution

L’évolution de la coxarthrose commune est lente avec une augmentation du handicap douloureux de la raideur et de l’atrophie de la cuisse et enfin un raccourcissement du membre inférieur qui se fixe en attitude vicieuse. Le recours à la prothèse totale de hanche survient en moyenne au bout de 7-8 ans. L’évolution peut se faire par des poussées successives de chondrolyse ou être rapide (coxarthrose destructrice rapide).

Traitement

 La prise en charge est multidisciplinaire. Le traitement médical est avant tout symptomatique et vise à diminuer les douleurs et l’atteinte fonctionnelle. Il repose sur l’économie locomotrice par éviction des sports exposant au risque restriction de la marche ou usage d’une canne.

Le paracétamol est le produit de choix à utiliser en première intention à la dose de 3 à 4 g/j. Le dextropropoxifène permet un certain gain d’efficacité au dépend d’effets secondaires surtout chez les sujets âgés à type de nausées constipation rétention urinaire somnolence. Le tramadol est un antalgique paramorphinique qui peut être tenté à la dose de 50 à 200 mg/24 h.

Les AINS sont prescrits en deuxième intention toujours à la demande et à la posologie utile minimale tout en respectant les précautions d’emploi surtout chez les sujets âgés [5].

 Les anti-arthrosiques symptomatiques d’action lente: le Chondroïtine sulfate (Structum) les insaponifiables d’avocat et de soja (Piasclédine) la diacérrhéine (ART 50) agissent en 1 à 4 mois et possèdent un effet rémanent. Ils ont pour intérêt leur parfaite tolérance et une épargne d’AINS.  

 Les infiltrations locales de corticoïdes peuvent être utilisées en cas de poussée congestive et parfois en cas de coxarthrose destructrice rapide. De même l’injection locale d’acide hyaluronique à haut poids moléculaire peut avoir un effet antalgique de longue durée [11].

Les traitements annexes: la rééducation est utile pour lutter contre un flexum débutant une amyotrophie qui se dessine et surtout contre la limitation des mouvements. Les cures thermales sont parfois efficaces pendant quelques mois sur la gêne douloureuse de la coxarthrose. 

Le malade est confié au chirurgien pour la prothèse quand il présente des lésions évoluées et/ou un handicap douloureux important malgré le traitement médical. Seuls les rares sujets jeunes ayant une coxarthrose débutante sur dysplasie et les coxarthroses destructrices rapides nécessitent une chirurgie précoce. La prothèse totale de hanche a transformé le devenir des arthroses sévères et évoluées avec plus de 90% de très bons résultats et la possibilité de mener une vie quasi-normale. Les complications surviennent dans 5% des cas à type de descellement septique ou aseptique de calcifications périprothétiques de luxations ou fractures.

 

1- Oliveria SA Felson DT Reed JI Cirillo PA Walker AM. Incidence of symptomatic hand hip and knee osteoarthritis among patients in health maintenance organizations. Arthritis Rheum 1995; 38: 1134–41.

2- Wilson MG Michet CJ Ilstrup DM Melton LJ. Idiopathic symptomatic osteoarthritis of the hip and knee. A population-based incidence study. Mayo Clin Proc 1990; 65:1214–21.

3- Richard S Vignon E. Coxarthrose. La revue du praticien 1999; 49.

4- Lequesne M. La coxarthrose. La revue du praticien 1996 46.

5- Lequesne M. Coxopathies chroniques de l’adulte: diagnostic et traitement. Encyclopédie médico-chirurgicale14-308-A-10.

6- Mazières B. The hip. Rheumatology 58: 655.

7- Le Breton C Sobotka A Bappé P M Korzec J Bigot JM. Imagerie de la hanche normale et pathologique. Encyclopédie Médico-Chirurgicale 30-450-A-10.

8- Michel Lequesne. Le faux profil de la hanche : place intérêt incidence économique. Rev Rhum 2002; 69: 192-6

9- Godefroy D Morvan J Drapé JL Dupont AM Chevrot A. Techniques d’imagerie de la hanche. Imagerie de la hanche. In : Getroa Opus XXVI.  Sauramps Medical ; 1999.p.47

10- Lequesne M De Seze S Amouroux J. La coxarthrose destructive rapide. Rev Rhum Mal Osteoartic 1970; 37: 721-33

11- Conrozier T Bertin P Bailleul F Mathieu P et al. Réponse clinique aux injections intra-articulaires d’hylane G-F 20 dans la coxarthrose symptomatique: critères de l’OMERACT-OARSI appliqués aux résultats d’une étude pilote. Rev Rhum 2006; 73: 1373-77.